Pierre Ferrarini, scripteur du temps

 

 

 

Pierre Ferrarini, s’il avait vécu au quattrocento, aurait sans doute été scribe. Mais il est homme de cette époque, et le langage artistique qu’il  a choisi tient cependant d’un minimalisme absolu. Il y a d’abord les outils mis en œuvre : une simple carte blanche format A6 (14,8 x 10,5 cm), un crayon de graphite, une plume de 0,5 mm, de l’encre de Chine Pelikan puis vient l’assemblage des cartes par système informatique et le tirage par jet d’encre pour aboutir à l’objet tableau. Il y a le travail du dessin dans une systématique humble, quasi monacale et régulière face au support. Il en résulte une écriture picturale où la texture, le tissage, l’entrelac sont les signifiants dominants d’un rapport à l’espace où le vide est absent. Ou bien peut être encore que ce plein linéaire  qui envahit le champ spatial serait une autre manière  de tendre au vide, remplir pour mieux faire le vide et être présent pleinement dans l’instance.

 

Pierre Ferrarini, en architecte de sa propre pensée, a inventé sa discipline artistique personnelle dans un engagement quasi ascétique face à cette fatalité universelle du temps qui se mesure, qu’il faut bien mesurer pour en prendre conscience. Baudelaire nous avait prévenu, le dandysme  n’est pas loin d’une rigueur religieuse. L’artiste a choisi comme tracé, avec le double sens que ce terme peut avoir ici, une trajectoire radicale, sans concession, ni aux  bruits de la mode, ni à l’esbroufe, mais avec une conséquence déterminée au postulat qu’il s’est fixé.

 

L’œuvre de Pierre Ferrarini se posture dans une conscience extrême de l’instant même, pour nous le renvoyer dans une cartographie où le regard peut voyager sans fin en nous invitant alors à gagner le temps de regarder et savoir voir ce qui d’ordinaire se mesure, la temporalité, dont il a la subtilité de nous donner une vision à nulle autre pareille.

 

 

 

                                                                                                         Joseph Farine

                                                                                                                                                                         Février 2012